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prématuré des choses, ce qui fait qu’ils sont en quelque façon plus réservés. Qu’on y fasse attention ! Ce qui plaît dans le discours d’un enfant vient, dans le fond, de la sottise de l’enfant, qui n’a pas été 5 frappé de ce qu’il dit, comme il falloit, et n’a vu ni senti ce qu’il falloit. 11 n’y a que ceux qui ont de l’esprit qui paroissent sots.

1183 (52. I, p. 56). — Gens singuliers. — Il y a des gens si bizarres que ce sont les grotesques de notre 1o espèce.

Leur esprit décline généralement de tous les esprits.

Dès qu’un homme pense, et qu’il a un caractère, on dit : « C’est un homme singuliers 15 La plupart des gens se ressemblent en ce qu’ils ne pensent point : échos éternels, qui n’ont jamais rien dit et ont toujours répété ; artisans grossiers des idées des autres.

Il faut que la singularité consiste dans une manière 2o fine de penser (?), qui a échappé aux autres : car un homme qui ne sauroit se distinguer que par une chaussure particulière seroit un sot par tout pays.

Les pensées et les actions d’un homme singulier lui sont tellement propres qu’un autre homme ne 23 pourroit jamais les employer sans se démentir.

1184* (2163. III, f° 354 vo). — Il est aisé de sentir

en général ce qui est ridicule ; mais on a le tact fin

lorsqu’on sent ce qui est ridicule là, c’est-à-dire

devant chaque société et devant chaque personne.