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tant ; et cela est si vrai que rien ne paroît si héroïque sur nos théâtres que l’action d’un prince qui, dans sa gloire, retrouve avec plaisir un berger qu’il croit être son père, et dont il ne rougit pas.

J’avoue que j’ai trop de vanité pour souhaiter que =, mes enfants fissent un jour une grande fortune : ce ne seroit qu’à force de raison qu’ils pourroient soutenir l’idée de moi. Ils auroient besoin de toute leur vertu pour m’avouer ; ils regarderoient mon tombeau comme le monument de leur honte. Je puis croire 1o qu’ils ne le détruiroient pas de leurs propres mains ; mais ils ne le relèveroient pas sans doute s’il étoit tombé à terre. Je serois l’achoppement éternel de la flatterie, et je mettrois dans l’embarras ses courtisans. Vingt fois par jour, ma mémoire seroit incom- ô mode, et mon ombre malheureuse tourmenteroit sans cesse les vivants.

Ceux donc qui ont tant d’ambition, et qui l’ont si sotte, pensent aussi follement qu’Agrippine, qui disoit aux devins : « Que je meure, pourvu que mon 2o fils soit empereur ! »

1136(1106. II, f° 74). — Pourquoi est-ce que les enfants des avares sont prodigues ? C’est que les uns ont pour objet de faire une fortune ; les autres, d’en jouir. De plus, les uns sont accoutumés à l’opulence ; 25 les autres ont été élevés dans l’épargne. Ce qui est si vrai que les enfants des riches négociants ne sont pas plus prodigues que leurs pères.

1137 (1395. II, f° 202). — Il y a bien des gens