Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t2, 1901.djvu/133

Cette page n’a pas encore été corrigée


1134 (2054. III, f° 341 v°).—Je disois : « La médiocrité est un garde-fou.»

1135* (1387. II, f° 199). — La médiocrité est une vertu de tous les états : car, comme elle n’est proprement qu’une économie sage et réglée de la condi- 5 tion présente, elle peut non seulement mettre des douceurs dans la vie des moindres particuliers, mais faire encore la félicité des Roix.

C’est ordinairement un malheur d’avoir plus de richesses qu’il ne convient à son état, parce qu’on 1o ne peut guère les dépenser sans insolence ou les garder sans avarice.

Un homme qui est dans la bassesse, et qui voudroit avoir de grands biens, ne pense pas qu’il n’en pourroit faire que fort peu d’usage, et que presque ô toutes les choses que son argent pourroit lui procurer seroient à son égard comme étoit autrefois la pourpre, dont l’usage n’étoit permis qu’aux Roix.

Car, comme on veut qu’un homme de haute nais- 2o sance conserve une noble fierté dans la disgrâce, on veut de même qu’un homme de néant conserve de la modestie dans sa fortune.

Sans cela, on est sûr de perdre le plus précieux de tous les biens, qui est la bienveillance du peuple, 2s et de tomber dans un grand malheur, qui est le fléau (sic) de ridicule dont il couvre ceux qui se sont offerts à ses mépris.

Si un nouveau riche va d’abord bâtir une maison superbe, il offensera les yeux de tous ceux qui la 3o