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pères n’est point un rapport de la copie à son original, comme si l’imagination des pères ou qûelque cause secrète pouvoit imprimer sur le visage des enfants les traits qu’ils ont eux-mêmes. Cela seroit

5 entièrement inexplicable à la physique. Cette ressemblance est uniquement fondée sur ce que l’enfant étant formé de la substance du père et ayant eu, neuf mois de suite, une vie commune avec la mère, il y a, dans les uns et dans les autres, un

10 rapport dans les fluides et les solides. Ainsi cette qualité ou cette combinaison d’humeurs qui donne des cheveux noirs, une peau blanche, de belles dents, une grande taille ou des traits délicats au père ou à la mère, les donnera de même à l’enfant.

i5 Les peintres savent combien il faut peu de chose pour qu’un visage paroisse à peu près ressembler à un autre, et à quel point un rapport dans une partie frappe dans le tout : un trait seul régnera sur toute une physionomie...

io Comme les vices et les vertus humaines sont ordinairement l’effet des passions, et les passions l’effet d’un certain état de la machine — je parle du matériel des passions, et non pas du formel, c’est-à-dire de cette complaisance que l’âme sent à suivre les

25 mouvements de sa machine, par la douceur qu’elle y trouve — il y a des maladies qui peuvent nous mettre dans la situation où l’on est lors de la passion même. Celles qui donneront à notre sang la disposition où est celui d’un homme hardi nous

30 rendront courageux ; celles qui nous mettront dans un état contraire nous rendront timides. Les médecins