prend soin de conduire Ulysse, le tourne à la vertu, le dérobe à mille dangers, et le fait jouir du ciel, même dans sa colère.
Si nous connaissions bien le prix d’un véritable ami, nous passerions notre vie à le chercher. Ce serait le plus grand des biens que nous demanderions au Ciel ; et, quand il aurait rempli nos vœux, nous nous croirions aussi heureux que s’il nous avait créés avec plusieurs âmes pour veiller sur notre faible et misérable machine.
La plupart des gens, séduits par les apparences, se laissent prendre aux appâts trompeurs d’une basse et servile complaisance ; ils la prennent pour un signe d’une véritable amitié, et confondent, comme disait Pythagore, le chant des Sirènes avec celui des Muses.
Ils croient, dis-je, qu’elle produit l’amitié, comme les gens simples pensent que la terre a fait les Dieux ; au lieu de dire que c’est la sincérité qui la fait naître comme les Dieux ont créé les signes et les puissances célestes.
Oui ! C’est d’une source aussi pure que l’amitié doit sortir, et c’est une belle origine que celle qu’elle tire d’une vertu qui donne la naissance à tant d’autres.
Les grandes vertus, qui naissent, si je l’ose dire, dans la partie de l’âme la plus relevée et la plus divine, semblent être enchaînées les unes aux autres. Qu’un homme ait la force d’être sincère, vous verrez un certain courage répandu dans tout son caractère, une indépendance générale, un empire sur lui-même égal à celui qu’on exerce sur les autres, une âme exempte des nuages de la crainte et de la terreur,