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DISCOURS SUR CICÉRON

rentra, pour ainsi dire, dans l’enfance, et il fut remis aux premiers principes.

Quel plaisir de le voir, dans son livre De la Nature des Dieux, faire passer en revue toutes les sectes, confondre tous les philosophes, et marquer chaque préjugé de quelque flétrissure ! Tantôt il combat contre ces monstres ; tantôt il se joue de la philosophie. Les champions qu’il introduit se détruisent eux-mêmes ; celui-là est confondu par celui-ci, qui se trouve battu à son tour. Tous ces systèmes s’évanouissent les uns devant les autres, et il ne reste, dans l’esprit du lecteur, que du mépris pour les philosophes et de l’admiration pour le critique.

Avec quelle satisfaction ne le voit-on pas, dans son livre De la Divination, affranchir l’esprit des Romains du joug ridicule des aruspices et des règles de cet art, qui étoît l’opprobre de la théologie payenne, qui fut établi dans le commencement, par la politique des magistrats, chez des peuples grossiers, et affoibli, par la même politique, lorsqu’ils devinrent plus éclairés.

Tantôt il nous dévoile les charmes de l’amitié et nous en fait sentir tous les délices ; tantôt il nous fait voir les avantages d’un âge que la raison éclaire, et qui nous sauve de la violence des passions.

Tantôt, formant nos mœurs et nous montrant l’étendue de nos devoirs, il nous apprend ce que c’est que l’honnête et ce que c’est que l’utile ; ce que nous devons à la société, ce que nous devons à nous-mêmes ; ce que nous devons faire en qualité de pères de familles ou en qualité de citoyens.