Page:Montesquieu - Mélanges inédits, 1892.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée
232
GRANDEUR ET DÉCADENCE

La Constitution ayant été reçue en France, il étoit naturel de croire que la paix auroit dû suivre de là, et que les armes, de côté et d’autre, dévoient tomber des mains. Mais la malheureuse destinée de ce royaume a voulu que les deux partis allassent examiner comment cette constitution avoit été reçue, et de quelle manière elle devoit être qualifiée dans l’Église et dans l’État : méthode qui ne pouvoit que rendre les disputes éternelles, parce qu’une qualification une fois accordée, on pouvoit toujours disputer sur une autre ; et cela, à l’infini.

L’auteur de ce mémoire avoue qu’il n’a point suivi avec attention toutes les choses qui se sont faites, de part et d’autre, sur cette matière ; parce que tant d’intérêts personnels y ont été mêlés, ces disputes ont été la source de tant de fortunes, tant de gens se sont accrédités par là, qui, sans ces disputes, n’auroient été rien dans l’État, ni dans l’Église, tant de gens même ont mêlé, à de très bonnes intentions, leurs préventions particulières, enfin, il s’est fait tant de choses, et on a si peu avancé, qu’il semble que la sagesse a été d’ignorer même ce qui se passoit sous les yeux, et de laisser les têtes s’échauffer, sans prendre de part à leur chaleur.

Tout ce qu’on peut dire, c’est que le Roi a de sages ministres dans son Conseil d’État, et sans doute bien intentionnés, et que c’est ce conseil qui doit être uniquement son Conseil de Conscience, et que les ecclésiastiques, quelque respectables qu’ils soient par leur état et leur caractère, n’y doivent