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MONTESQUIEU

Ce qui l’empêche de réussir si bien dans le gouvernement de l’intérieur du royaume, c’est qu’il veut sans cesse aller du bien au mieux, et qu’il est toujours plus frappé du mal que de l’inconvénient qu’il y a à le réparer.

Il corrige là où il faudroit tolérer ; comme si le peuple, qui pense avec tant de lenteur, pouvoit changer d’esprit dans un moment et regarder comme des abus des choses que le temps, les exemples et la raison même lui ont fait regarder comme des loix.

Quelquefois, c’est la nécessité qui fait les abus ; quelquefois, en se relâchant d’une loi, on se l’a (sic) rendue telle que le législateur auroit dû la faire ; et le peuple, qui a exécuté, s’est montré plus sage que le législateur qui a prescrit. Enfin, il y a bien des choses qu’il eût été bon qu’on n’eût jamais faites, et qu’il eût été à souhaiter qu’on n’eût pas détruites.

Je crois bien qu’Alcamène craint les Dieux immortels, mais il manque quelquefois d’un certain respect pour leurs ministres. En fait d’administration, son principe est que le Ciel n’a pas moins fait la religion pour les hommes que les hommes pour la religion.

LETTRE SECONDE

Alcamène s’est refusé à peu de femmes ; mais il y en a bien peu qui puissent se vanter qu’il ait eu de l’estime pour elles.

Il aima dans ses premières années ; il trouva un cœur tendre et des plaisirs réservés à ceux qui