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RÉFLEXIONS SUR QUELQUES PRINCES
VII

Comme Henry III a été le martyr de ses vices, je m’étendrai un peu sur ce prince, sur le caractère d’esprit qui régnoit à sa cour et l’état où étoit pour lors sa nation.

Il étoit affoibli par les deux choses les plus capables de perdre les hommes : la mollesse et la superstition.

Un vice qui n’est malheureusement inconnu qu’aux nations barbares fut porté à sa cour jusqu’à une licence effrénée.

Les femmes, qui avoient joué un si grand rôle à la cour de François Ier, à celle de Henry II, et dans les différentes régences de la reine Catherine, ne manquèrent pas de décrier ce règne ; et, comme elles donnoient le ton et pouvoient tout dans un parti dont les jeunes gens et les dévots étoient l’âme, elles lui jouèrent des tours au-dessus de leur sexe et échauffèrent encore plus la Ligue que les prêcheurs.

Le Roi, qui portoit la fureur jusqu’à les haïr, les décrioit de son mieux. Il publioit leurs galanteries, et, qui pis est, de certains défauts secrets que la pudeur cache encore après qu’on l’a perdue. Instruit, par ses mignons, de tous ces détails, il ne s’entretenoit que de ces sortes de discours, qui sont heureux quand ils ne sont qu’inutiles, et qu’on ne pardonne pas même à l’oisiveté des particuliers.

Comme la reine de Navarre avoit fait des railleries