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MONTESQUIEU

tant de changer de conduite avec des princes qui varioient toujours, et d’abandonner tous les anciens plans, dans un temps où tous les états d’Europe avoient pris de nouveaux intérêts.

Il éleva aux dignités tous les gens de mérite qu’il put trouver et les intéressa à la défense commune.

Le Concile, que ses prédécesseurs avoient tant craint, tant promis, tant refusé, il l’accorda ; et, sans s’émouvoir de ce qui s’étoit passé à Constance et à Bâle, il vit qu’il étoit dans d’autres circonstances : que sa querelle étoit celle de tout le clergé ; que, dans un temps où l’esprit général étoit de corriger, il falloit, par un concile, prévenir les assemblées laïques et se conserver par là le jugement des dogmes et le droit de réformer.

Il jugea que, la plupart des princes ayant perdu le respect pour le pontificat, c’est-à-dire pour cette puissance qui n’est défendue que par le respect, il falloit qu’il se rendît lui-même considérable par une armée, et qu’il facilitât par là les négociations.

Il regarda avec attention les différents effets de cette fermentation générale qui étoit dans l’Europe, profita des uns, se joua des autres, et sentit toujours le premier ce qui pouvoit lui nuire ou le servir.

Lorsque Charles-Quint eut pris le mauvais parti de régler lui-même les disputes de religion, le Pape qui savoit bien que, dans ces sortes d’affaires, il n’y a point de conciliation, et que tous les partis sont extrêmes, ne fit que rire de la malhabileté de ce prince, qui alloit s’attirer contre lui les Protestants et les Catholiques, et il ne se vit jamais plus à la tête