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MONTESQUIEU

est ordinairement le point de la plus grande perfection où il puisse être pour recevoir des idées. Mais, s’il arrivoit par hasard qu’il se trouvât parfaitement formé avant que le tout eût cessé de croître, vous voyez que, ses fibres grossissant, il perdroit cette disposition de perfection qu’il avoit déjà acquise. Ainsi on peut dire qu’il n’y a pas de préjugé plus certain dans les enfants pour la sottise à venir que l’esprit qu’on leur remarque d’avance.

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Les fibres grossissent et se fortifient beaucoup par le travail. Dans le repos, les parties rameuses et oléagineuses du sang s’arrêtent dans les cellules graisseuses, toujours ouvertes pour les recevoir. Mais, dans le mouvement, les parties nutritives sont appelées jusques aux extrémités des fibres ; la force de la circulation les applique et les insinue sur les fibres et dans les intervalles de ces fibres. La fibre doit donc devenir plus grosse, plus solide et plus compacte.

On remarque que, de deux parties du corps qui ont les mêmes fonctions, celles dont on fait plus d’usage sont mieux nourries et sont plus fortes. On a observé aussi que les gens de travail sont plus difficiles à purger, et que les autres remèdes de la médecine font sur eux moins d’effet. Leurs fibres sont donc plus dures, plus massives, plus grossières ; elles résistent mieux aux irritations et aux picotements des remèdes.

Non seulement le travail épaissit les fibres, il les durcit encore peu à peu. Voici comment je conçois que cela se fait. L’action des muscles est un mouv-