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ESSAI SUR LES CAUSES

La différence des sexes doit aussi diversifier les esprits. La révolution périodique qui se fait chez les femmes a des effets très étendus. Elle doit attaquer l’esprit même. On sait qu’elle a pour cause une plénitude, qui augmente continuellement pendant un mois ou environ ; après quoi, le sang, qui se trouve en trop grande quantité, force lui-même les passages. Or, cette quantité changeant chaque jour en elles, leur humeur et leur caractère doit changer de même.

Les femmes ont les fibres plus molles, plus lâches, plus flexibles, plus délicates que les hommes. La raison en est qu’une partie de leurs vaisseaux sont moins pressés ; car la cavité formée par l’os sacré, le coccyx, les os pubis, les os innominés, est plus grande chez elles. La matrice et les vaisseaux infinis qui la composent pourront mieux se dilater ; et, de la même manière que les veines ont une contexture moins forte que les artères, parce qu’elles peuvent être plus dilatées, il en sera de même de ces vaisseaux. D’ailleurs, le sang trop abondant pouvant s’ouvrir des passages, les vaisseaux n’auront pas besoin d’une contraction si forte pour le repousser des extrémités au centre.

De plus, les hommes ont un organe qui, par une fonction qu’il commence à avoir chez eux à l’âge de la puberté, change dans un temps très court la contexture de leurs fibres, qui avoient auparavant la même délicatesse que celles des femmes. On ne sait pas expliquer de quelle manière cette liqueur séparée, filtrée, gardée dans ces organes, produit ces effets ; mais on le voit, et on voit qu’il n’arrive ni chez les