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MONTESQUIEU

cules propres du pays par où ils ont passé, ou enfin en donnant à l’air une plus grande légèreté. Mais la force de l’action est beaucoup augmentée par la promptitude ; car ils nous prennent tout à coup, et nous changent en un instant.

Il y a, en Italie, un vent du midi[1] appelé Chiroc, qui a passé par les sables d’Afrique. Il gouverne l’Italie ; il exerce sa puissance sur tous les esprits ; il produit une pesanteur et une inquiétude universelle. Un homme sent, dans son lit, que le vent est chiroc ; on se gouverne différemment de ce qu’on faisoit la veille. Enfin, le Chiroc est l’intelligence qui préside sur toutes les têtes italiennes, et je serois tenté de croire que cette différence qui se trouve entre l’esprit et le caractère des habitants de Lombardie et celui des autres Italiens vient de ce que la Lombardie[2] est couverte par l’Apennin, qui la défend des ravages du Chiroc.

Les Anglois ont aussi leur vent d’est. Mais il y a cette différence que les maladies qui attaquent l’esprit chez les Italiens les portent beaucoup à se conserver, au lieu que celles qui attaquent l’esprit des Anglois les portent à se détruire. La maladie angloise n’est point simplement l’effet d’une cause passagère, mais de plusieurs autres qui ont agi de longue main[3].

  1. C’est proprement le sud-est. La relation de l’Égypte du Père Ansted nous apprend qu’elle est sujette aux ravages du même vent du midi.
  2. La Lombardie est un triangle, qui a sa pointe au Piémont, sa base à la mer Adriatique, et les côtés formés par les Alpes et par l’Apennin.
  3. [En marge : ] Mettre aux loix relatives au climat.