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MONTESQUIEU

l’artère et de la veine pulmonaire, qui, cessant d’être affaissées, permettent au sang de traverser toute la substance des poumons. Quand l’air a beaucoup de ressort, il se fait un nombre infini de petites percussions dans les parois des vésicules, et, par conséquent, sur les tuniques des vaisseaux du sang qui rampent dessus. Ce sont des degrés de mouvement continuellement ajoutés ; le sang se divise mieux, et il devient plus propre à une abondante sécrétion d’esprit.

On attribuoit à la subtilité de l’air d’Athènes celle de l’esprit des Athéniens[1], et il y a bien de l’apparence que c’en étoit une des plus grandes causes, puisque, aujourd’hui que les Athéniens, esclaves et sans éducation, n’ont guère que l’air pour eux, sous l’empire du Turc, leur génie se remarque encore.

On a ouï parler de l’esprit des Canarins, peuples qui habitent le territoire de Goa. Ils ont tant d’avantages sur le Portugais, qu’ils font plus de progrès dans les collèges, dans six mois, en quelque science que ce soit, que les Européens, dans un an ; et cette supériorité va si loin qu’elle donne de l’ombrage à la nation dominante. Les Portugais défendent aux Canarins d’équiper des vaisseaux ; il les affoiblissent, dans le cœur et dans l’esprit[2], par une espèce d’esclavage ; ils ne leur permettent de posséder aucun emploi, excepté celui de solliciteur de procès, où ils exercent une chicane si subtile qu’elle passe les espérances des plaideurs,

  1. [En marge : ] Citer.
  2. [En marge : ] Oter cela ou le diminuer.