Page:Montesquieu - Mélanges inédits, 1892.djvu/180

Cette page n’a pas encore été corrigée
114
MONTESQUIEU

dans le cerveau, ou le pressent, ce qui est la même chose. Or ce nouveau sentiment n’est qu’une idée ou représentation, puisque l’âme sent bien que ce n’est pas la sensation même, et que ce mouvement ne lui vient pas, comme l’autre, de toute l’étendue du nerf, ni d’une action étrangère, mais de la force de sa volonté. Il n’en faut pas davantage pour expliquer ce que c’est que le sentiment. Les perceptions, les idées, la mémoire, c’est toujours la même opération, qui vient de la seule faculté que l’âme a de sentir ; mais l’on voit de quelle nécessité il est que les fibres du cerveau soient flexibles.

La trop grande rigidité ou grossièreté des fibres[1] peut produire la lenteur dans l’esprit ; mais leur trop grande flexibilité, lorsqu’elle est accompagnée de relâchement, en peut produire la foiblesse ; et, quand cette délicatesse et ce relâchement se trouvent joints à une grande abondance d’esprits animaux, l’inconstance, la bizarrerie, les caprices en sont les effets naturels : le cerveau est vivement mû par l’objet présent et cesse de l’être par les autres.

    circulent pas des parties au cerveau, et qu’il y a apparence qu’ils continuent leur route. Mais pourquoi ne peuvent-ils pas presser des extrémités vers le cerveau, puisqu’ils sont des tuyaux pleins ? — De là je conclus, par l’analogie des opérations, que l’âme ne sent, par le ministère des autres nerfs, que par les pressions qu’un canal plein de liqueur, pressé d’un côté, fait effet sur l’autre, doit de même, pressé par l’autre bout, faire effet sur le premier. Si donc l’âme, pressant les fibres du côté de la moelle allongée, envoie des esprits vers les jambes, les nerfs qui, partant du cerveau, aboutissent aux jambes, pressés du côté des jambes, doivent faire une pression dans le cerveau par leur (?) moyen (?).

  1. i. [En marge :] Peut-être ôter cela.