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HISTOIRE VÉRITABLE

ger à cacher des choses que la pudeur dérobe à tous les regards. Une maladie à peu près semblable parut, il y a dix ans, à Athènes ; mais elle n’eut pas précisément les mêmes effets : c’étoit l’âme qui vouloit se montrer toute nue. Tout le monde parloit de soi avec une naïveté si singulière qu’on disoit les choses mêmes qu’on avoit le plus d’intérêt à ne pas révéler. Ce n’étoit pas le sentiment de pudeur qu’on avoit perdu, mais l’artifice qui fait que l’on se montre autrement que l’on est : soit qu’on exagère ses vices ou ses foiblesses pour faire voir qu’on ne les a pas, soit qu’on diminue ses vertus pour faire voir qu’on a celles qui ornent toutes les autres. On ne peut mieux comparer l’état des Athéniens pour lors qu’à celui où nous sommes quand, dans nos songes, nous révélons toutes les choses que nos avons dites et que nous avons faites. Ainsi l’on ne dissimuloit rien ; chacun croyoit parler à soi-même.

» Le bruit de cette maladie s’étant répandu chez les villes grecques, un grand nombre d’étrangers vinrent à Athènes. Mais les magistrats, ne leur voulant pas donner le spectacle des foiblesses de leurs concitoyens, leur firent fermer les portes…………………………………………………………… »


CINQUIÈME PARTIE

» Vous prêtâtes hier tant d’attention à mes discours, mon cher Ayesda, et j’ai, de mon côté, un tel foible pour ceux qui m’écoutent, qu’il faut que je