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MONTESQUIEU

fique temple. « Que veut dire ceci ? dis-je en moi-même. C’est la seule mauvaise action que j’ai faite, et d’abord on m’élève des autels[1]. »

SECONDE PARTIE

« Il auroit été à souhaiter, lorsque je devins s homme, que j’eusse eu autant de vertu que lorsque j’étois une si grosse bête. Mais je ne trouvai plus la même tranquillité d’esprit, ni cette liberté de raisonnement, cette sagesse et cette prudence que j’avois eues. Au contraire, j’étois plein de passions, de caprices et de contretemps.

» Mon entrée dans le monde ne fut pas heureuse, car, à l’âge de dix-huit ans, je fus pendu. J’en dirois bien la cause ; mais je passe légèrement sur cela. Suffit que je me comportai très-bien, et que, dans tout le chemin, on louoit beaucoup ma contenance. « En vérité, dit un artisan, il a de l’honneur dans son fait. » — « Je suis, disoit un autre, un homme d’habitude : il y a trente ans que j’assiste régulièrement à ces sortes d’assemblées ; mais je n’ai jamais vu d’homme qui s’en soit mieux tiré que celui-là. »

» Je vous dis, mon cher Ayesda, des choses que je pourrois bien vous cacher ; mais, ayant continuellement changé, je ne me regarde pas comme un individu. J’ai été très souvent fripon, assez rarement

  1. [En marge :] Mettre ici le cheval qui est à la fin de la seconde partie. Page 33, v°. [Voyez la note 1 de la page 51.]