Solim est votre premier eunuque, non pas pour vous garder, mais pour vous punir. Que tout le sérail s’abaisse devant lui. Il doit juger vos actions passées : et, pour l’avenir, il vous fera vivre sous un joug si rigoureux que vous regretterez votre liberté, si vous ne regrettez pas votre vertu.
LETTRE CLV.
eureux celui qui, connoissant le prix d’une vie douce et tranquille, repose son cœur au milieu de sa famille, et ne connaît d’autre terre que celle qui lui a donné le jour.
Je vis dans un climat barbare, présent à tout ce qui m’importune, absent de tout ce qui m’intéresse. Une tristesse sombre me saisit ; je tombe dans un accablement affreux : il me semble que je m’anéantis ; et je ne me retrouve moi-même que lorsqu’une sombre jalousie vient s’allumer et enfanter dans mon âme la crainte, les soupçons, la haine et les regrets.
Tu me connois, Nessir ; tu as toujours vu dans mon cœur comme dans le tien : je te ferois pitié si tu savois mon état déplorable. J’attends quelquefois six mois entiers des nouvelles du sérail ; je compte tous les instants qui s’écoulent ; mon