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Ta science est un abîme plus profond que l’Océan ; ton esprit est plus perçant que Zufagar, cette épée d’Ali, qui avait deux pointes ; tu sais ce qui se passe dans les neuf chœurs des puissances célestes ; tu lis l’Alcoran sur la poitrine de notre divin prophète ; et, lorsque tu trouves quelque passage obscur, un ange, par son ordre, déploie ses ailes rapides, et descend du trône pour t’en révéler le secret.

Je pourrois par ton moyen avoir avec les séraphins une intime correspondance : car enfin, treizième immaum, n’es-tu pas le centre où le ciel et la terre aboutissent, et le point de communication entre l’abîme et l’empyrée ?

Je suis au milieu d’un peuple profane : permets que je me purifie avec toi ; souffre que je tourne mon visage vers les lieux sacrés que tu habites ; distingue-moi des méchants, comme on distingue, au lever de l’aurore, le filet blanc d’avec le filet noir ; aide-moi de tes conseils ; prends soin de mon âme ; enivre-la de l’esprit des prophètes ; nourris-la de la science du paradis, et permets que je mette ses plaies à tes pieds. Adresse tes lettres sacrées à Erzeron, où je resterai quelques mois.

D’Erzeron, le 11 de la lune de Gemmadi 2, 1711.


LETTRE XVII.

USBEK AU MÊME.


Je ne puis, divin mollak, calmer mon impatience : je ne saurois attendre ta sublime