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gazouillements qu’il étoit plus commode qu’ils l’élevassent, parce qu’ils pouvoient plus facilement rassembler plusieurs fruits de divers lieux. Les vents murmuroient, et disoient : C’est plutôt à nous, parce que nous pouvons lui apporter de tous les endroits les odeurs les plus agréables. — Non, non, disoient les nuées, non ; c’est à nos soins qu’il sera confié, parce que nous lui ferons part à tous les instants de la fraîcheur des eaux. Là-dessus les anges indignés s’écrioient : Que nous restera-t-il donc à faire ? Mais une voix du Ciel fut entendue, qui termina toutes les disputes : Il ne sera point ôté d’entre les mains des mortels, parce qu’heureuses les mamelles qui l’allaiteront, et les mains qui le toucheront, et la maison qu’il habitera, et le lit où il reposera.

Après tant de témoignages si éclatants, mon cher Josué, il faut avoir un cœur de fer pour ne pas croire sa sainte loi. Que pouvait faire davantage le ciel pour autoriser sa mission divine, à moins de renverser la nature et de faire périr les hommes mêmes qu’il vouloit convaincre ?

À Paris, le 20 de la lune de Rhégeb, 1713.

LETTRE xl.

Usbek à Ibben.
À Smyrne.


Dèsqu’un grand est mort, on s’assemble dans une mosquée, et l’on fait son oraison funèbre, qui est un discours à sa louange, avec lequel on