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Je me souviens que Thyrsis porta à ma Thémire des fleurs nouvelles : malheureux que je suis ! elle les a mises sur son sein ! C’est un présent de Thyrsis, disait-elle. Ah ! j’aurais dû les arracher, et les fouler à mes pieds.

Il n’y a pas long-temps que j’allais avec Camille faire à Vénus un sacrifice de deux tourterelles ; elles m’échappèrent, et s’envolèrent dans les airs.

J’avais écrit sur des arbres mon nom avec celui de Thémire, j’avais écrit mes amours : je les lisais et relisais sans cesse ; un matin je les trouvai effacés.

Camille, ne désespère point un malheureux qui t’aime : l’amour qu’on irrite peut avoir tous les effets de la haine.

Le premier Gnidien qui regardera ma Thémire, je le poursuivrai jusque dans le temple, et je le punirai, fût-il aux pieds de Vénus.

Cependant nous arrivâmes près de l’antre sacré où la déesse rend ses oracles. Le peuple était comme les flots de la mer agitée : ceux-ci venaient d’entendre, les autres allaient chercher leur réponse.

Nous entrâmes dans la foule ; je perdis l’heureux Aristée. Déjà il avait embrassé sa Camille ; et moi je cherchais encore ma Thémire.