Page:Montesquieu - Le Temple de Gnide, 1824.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dans tout ce récit, vous ne trouverez rien que de très simple : mes aventures ne sont que les sentimens d’un cœur tendre, que mes plaisirs, que mes peines ; et, comme mon amour pour Camille fait le bonheur, il fait aussi toute l’histoire de ma vie.

Camille est fille d’un des principaux habitans de Gnide. Elle est belle ; elle a une physionomie qui va se peindre dans tous les cœurs : les femmes qui font des souhaits demandent aux dieux les grâces de Camille ; les hommes qui la voient veulent la voir toujours, ou craignent de la voir encore.

Elle a une taille charmante, un air noble, mais modeste, des yeux vifs et tout prêts à être tendres, des traits faits exprès l’un pour l’autre, des charmes invisiblement assortis pour la tyrannie des cœurs.

Camille ne cherche point à se parer ; mais elle est mieux parée que les autres femmes.

Elle a un esprit que la nature refuse presque toujours aux belles. Elle se prête également au sérieux et à l’enjouement. Si vous voulez, elle pensera sensément ; si vous voulez, elle badinera comme les Grâces.

Plus on a d’esprit, plus on en trouve à Camille.