Page:Montesquieu - Le Temple de Gnide, 1824.djvu/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il n’y eut jamais un si grand spectacle : les peuples étaient séparés des peuples ; les yeux erraient de pays en pays, depuis le couchant jusqu’à l’aurore : il semblait que Gnide fût tout l’univers.

Les dieux ont partagé la beauté entre les nations, comme la nature l’a partagée entre les déesses. Là, on voyait la beauté fière de Pallas ; ici, la grandeur et la majesté de Junon ; plus loin, la simplicité de Diane, la délicatesse de Thétis, le charme des Grâces, et quelquefois le sourire de Vénus.

Il semblait que chaque peuple eût une manière particulière d’exprimer sa pudeur, et que toutes ces femmes voulussent se jouer des yeux : les unes découvraient la gorge et cachaient leurs épaules : les autres montraient les épaules et couvraient la gorge : celles qui vous dérobaient le pied vous payaient par d’autres charmes : et là on rougissait de ce qu’ici on appelait bienséance.

Les dieux sont si charmés de Thémire qu’ils ne la regardent jamais sans sourire de leur ouvrage. De toutes les déesses, il n’y a que Vénus qui la voie avec plaisir, et que les dieux ne raillent point d’un peu de jalousie.

Comme on remarque une rose au milieu des