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MONTESQUIEU

Indigné des bassesses des hommes, je m’enfuis et me retiray dans les bois. Tous les animaux qui craignent les bêtes féroces venoient paître autour de moy, et regardoient comme un asile les lieux où j’étois. Cela me faisoit plaisir, et je disois en moy-même : « On donne au lion le titre de Roi des animaux ; il n’en est que le tyran, et j’en suis le Roi[1]. »

  1. Dans Arsace et Isménie, Montesquieu prête à l’ambassadeur des Parthes le petit discours suivant : « Un tigre d’Hircanie désoloit la contrée ; un éléphant l’étouffa sous ses pieds. Un jeune tigre restoit, et il étoit déjà aussi cruel que son père ; l’éléphant en délivra encore le pays. Tous les animaux qui craignoient les bêtes féroces venoient paître autour de lui. Il se plaisoit à voir qu’il étoit leur asile, et il disoit en lui-même : « On dit que le tigre est le Roi des animaux ; il n’en est que le tyran et j’en suis le Roi. »
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