guerre punique : mais ce qu’il firent dans la seconde nous marque une sagesse admirable. La république ne se trouvoit point en état d’acquitter ses dettes : l’as pesoit deux onces de cuivres ; & le denier, valant dix as, valoit vingt onces de cuivre. La république fit des as d’une once de cuivre[1]; elle gagna la moitié sur ses créanciers ; elle paya un denier avec ses dix onces de cuivre. Cette opération donna une grande secousse à l’état, il falloit la donner la moindre qu’il étoit possible ; elle contenoit une injustice, il falloit qu’elle fût la moindre qu’il étoit possible ; elle avoit pour objet la libération de la république envers ses citoyens, il ne falloit donc pas qu’elle eût celui de la libération des citoyens entre eux : cela fit faire une seconde opération ; & l’on ordonna que le denier, qui n’avoit été jusques-là que de dix as, en contiendroit seize. Il résulta, de cette double opération, que, pendant que les créanciers de la république perdoient la moitié[2], ceux des particuliers ne perdoient que le cinquieme[3] : les marchandises n’augmentoient que d’un cinquieme ; le changement réel dans la monnoie n’étoit que d’un cinquieme : on voit les autres conséquences.
Les Romains se conduisirent donc mieux que nous, qui, dans nos opérations, avons enveloppé & les fortunes publiques & les fortunes particulieres. Ce n’est pas tout : on va voir qu’ils les firent dans des circonstances plus favorables que nous.