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ter des présents, et en recevoir de lui de plus grands ; ils devaient conférer avec lui sur les affaires communes. C’est ce qui donna à Lothaire ces prétentions qui lui réussirent si mal. Quand Agobard écrivit pour ce prince, il allégua la disposition de l’empereur même, qui avait associé Lothaire à l’empire, après que, par trois jours de jeûne et par la célébration des saints sacrifices, par des prières et des aumônes, Dieu avait été consulté ; que la nation lui avait prêté serment, qu’elle ne pouvait point se parjurer ; qu’il avait envoyé Lothaire à Rome, pour être confirmé par le pape. Il pèse sur tout ceci, et non pas sur le droit d’aînesse. Il dit bien que l’empereur avait désigné un partage aux cadets, et qu’il avait préféré l’aîné ; mais en disant qu’il avait préféré l’aîné, c’était dire en même temps qu’il aurait pu préférer les cadets.

Mais quand les fiefs furent héréditaires, le droit d’aînesse s’établit dans la succession des fiefs, et, par la même raison, dans celle de la couronne, qui était le grand fief. La loi ancienne, qui formait des partages, ne subsista plus : les fiefs étant chargés d’un service, il fallait que le possesseur fût en état de le remplir. On établit un droit de primogéniture ; et la raison de la loi féodale força celle de la loi politique ou civile.

Les fiefs passant aux enfants du possesseur, les seigneurs perdaient la liberté d’en disposer ; et, pour s’en dédommager, ils établirent un droit qu’on appela le droit de rachat, dont parlent nos coutumes, qui se paya d’abord en ligne directe, et qui, par usage, ne se paya plus qu’en ligne collatérale.

Bientôt les fiefs purent être transportés aux étrangers, comme un bien patrimonial. Cela fit naître le droit de lods et ventes, établi dans presque tout le royaume.