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C’est un spectacle digne de pitié, de voir l’état des choses en ces temps-là. Pendant que Louis le Débonnaire faisait aux églises des dons immenses de ses domaines, ses enfants distribuaient les biens du clergé aux laïques. Souvent la même main qui fondait des abbayes nouvelles, dépouillait les anciennes. Le clergé n’avait point un état fixe. On lui ôtait ; il regagnait ; mais la couronne perdait toujours.

Vers la fin du règne de Charles le Chauve, et depuis ce règne, il ne fut plus guère question des démêlés du clergé et des laïques sur la restitution des biens de l’Église. Les évêques jetèrent bien encore quelques soupirs dans leurs remontrances à Charles le Chauve, que l’on trouve dans le capitulaire de l’an 856, et dans la lettre qu’ils écrivirent à Louis le Germanique l’an 858 ; mais ils proposaient des choses, et ils réclamaient des promesses tant de fois éludées, que l’on voit qu’ils n’avaient aucune espérance de les obtenir.

Il ne fut plus question que de réparer en général les torts faits dans l’Église et dans l’État. Les rois s’engageaient de ne point ôter aux leudes leurs hommes libres, et de ne plus donner les biens ecclésiastiques par des préceptions  ; de sorte que le clergé et la noblesse parurent s’unir d’intérêts.

Les étranges ravages des Normands, comme j’ai dit, contribuèrent beaucoup à mettre fin à ces querelles.

Les rois, tous les jours moins accrédités, et par les causes que j’ai dites, et par celles que je dirai, crurent n’avoir d’autre parti à prendre que de se mettre