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étonna les princes. Il faut que je rapporte à ce sujet la lettre que les évêques assemblés à Reims écrivirent à Louis le Germanique, qui était entré dans les terres de Charles le Chauve, parce qu’elle est très propre à nous faire voir quel était, dans ces temps-là, l’état des choses, et la situation des esprits. Ils disent que « saint Eucher ayant été ravi dans le ciel, il vit Charles Martel tourmenté dans l’enfer inférieur, par l’ordre des saints qui doivent assister avec Jésus-Christ au jugement dernier ; qu’il avait été condamné à cette peine avant le temps, pour avoir dépouillé les églises de leurs biens, et s’être par là rendu coupable des péchés de tous ceux qui les avaient dotées ; que le roi Pépin fit tenir à ce sujet un concile ; qu’il fit rendre aux églises tout ce qu’il put retirer des biens ecclésiastiques ; que, comme il n’en put ravoir qu’une partie à cause de ses démêlés avec Vaifre, duc d’Aquitaine, il fit faire, en faveur des églises, des lettres précaires du reste  ; et régla que les laïques paieraient une dîme des biens qu’ils tenaient des églises, et douze deniers pour chaque maison ; que Charlemagne ne donna point les biens de l’Église ; qu’il fit au contraire un capitulaire par lequel il s’engagea, pour lui et ses successeurs, de ne les donner jamais ; que tout ce qu’ils avancent est écrit, et que même plusieurs d’entre eux l’avaient entendu raconter à Louis le Débonnaire, père des deux rois ».

Le règlement du roi Pépin dont parlent les évêques fut fait dans le concile tenu à Leptines. L’É-