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veu Childebert s’obligent de maintenir les libéralités faites aux leudes et aux églises par les rois leurs prédécesseurs ; et il est permis aux reines, aux filles, aux veuves des rois, de disposer, par testament, et pour toujours, des choses qu’elles tiennent du fisc.

Marculfe écrivait ses Formules du temps des maires. On en voit plusieurs où les rois donnent et à la personne et aux héritiers  : et, comme les formules sont les images des actions ordinaires de la vie, elles prouvent que, sur la fin de la première race, une partie des fiefs passait déjà aux héritiers. Il s’en fallait bien que l’on eût, dans ce temps-là, l’idée d’un domaine inaliénable ; c’est une chose très moderne, et qu’on ne connaissait alors ni dans la théorie, ni dans la pratique.

On verra bientôt sur cela des preuves de fait : et, si je montre un temps où il ne se trouva plus de bénéfices pour l’année, ni aucun fonds pour son entretien, il faudra bien convenir que les anciens bénéfices avaient été aliénés. Ce temps est celui de Charles Martel, qui fonda de nouveaux fiefs, qu’il faut bien distinguer des premiers.

Lorsque les rois commencèrent à donner pour toujours, soit par la corruption qui se glissa dans le gouvernement, soit par la constitution même qui faisait que les rois étaient obligés de récompenser sans cesse, il était naturel qu’ils commençassent plutôt à donner à perpétuité les fiefs que les comtés. Se priver de quelques terres était peu de chose ; renoncer aux grands offices, c’était perdre la puissance même.