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Il paraît par Tacite que les Germains ne connaissaient que deux crimes capitaux : ils pendaient les traîtres, et noyaient les poltrons : c’étaient chez eux les seuls crimes qui fussent publics. Lorsqu’un homme avait fait quelque tort à un autre, les parents de la personne offensée ou lésée entraient dans la querelle ; et la haine s’apaisait par une satisfaction. Cette satisfaction regardait celui qui avait été offensé, s’il pouvait la recevoir ; et les parents, si l’injure ou le tort leur était commun ; ou si, par la mort de celui qui avait été offensé ou lésé, la satisfaction leur était dévolue.

De la manière dont parle Tacite, ces satisfactions se faisaient par une convention réciproque entre les parties : aussi, dans les codes des peuples barbares, ces satisfactions s’appellent-elles des compositions.

Je ne trouve que la loi des Frisons qui ait laissé le peuple dans cette situation où chaque famille ennemie était, pour ainsi dire, dans l’état de nature ; et où, sans être retenue par quelque loi politique ou civile, elle pouvait à sa fantaisie exercer sa vengeance, jusqu’à ce qu’elle eût été satisfaite. Cette loi même fut tempérée : on établit que celui dont on demandait la vie, aurait la paix dans sa maison, qu’il l’aurait en allant et en revenant de l’Église, et du lieu où l’on rendait les jugements.

Les compilateurs des lois saliques citent un ancien usage des Francs, par lequel celui qui avait exhumé un cadavre pour le dépouiller était banni de la société des hommes, jusqu’à ce que les parents consentissent à