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Les peuples germains n’étoient pas moins sensibles que nous au point d’honneur ; ils l’étoient même plus. Ainsi les parents les plus éloignés prenoient une part très vive aux injures ; et tous leurs codes sont fondés là-dessus. La loi des Lombards veut que celui qui, accompagné de ses gens, va battre un homme qui n’est point sur ses gardes, afin de le couvrir de honte et de ridicule, paie la moitié de la composition qu’il auroit due s’il l’avoit tué  ; et que si, par le même motif, il le lie, il paie les trois quarts de la même composition.

Disons donc que nos pères étoient extrêmement sensibles aux affronts ; mais que les affronts d’une espèce particulière, de recevoir des coups d’un certain instrument sur une certaine partie du corps, et donnés d’une certaine manière, ne leur étoient pas encore connus. Tout cela étoit compris dans l’affront d’être battu ; et, dans ce cas, la grandeur des excès faisoit la grandeur des outrages.


Chapitre XXI.

Nouvelle réflexion sur le point d’honneur chez les Germains


« C’étoit chez les Germains, dit Tacite une grande infamie d’avoir abandonné son bouclier dans le combat ; et plusieurs, après ce malheur, s’étoient donné la mort. » Aussi l’ancienne loi salique donne-t-elle quinze sols de composition à celui à qui on avoit dit par injure qu’il avoit abandonné son bouclier.