Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 2.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pendant que les prairies sont brûlées, le riz & les légumes y croissent heureusement, par les eaux qu’on y peut employer : une loi de religion qui ne permet que cette nourriture est donc très-utile aux hommes dans ces climats.

La chair[1] des bestiaux n’y a pas de goût ; & le lait & le beurre qu’ils en tirent, fait une partie de leur subsistance : la loi qui défend de manger & de tuer des vaches n’est donc pas déraisonnable aux Indes.

Athènes avoit dans son sein une multitude innombrable de peuple ; son territoire étoit stérile : ce fut une maxime religieuse, que ceux qui offroient aux dieux de certains petits présens, les honoroient[2]plus que ceux qui immoloient des bœufs.


CHAPITRE XXV.

Inconvénient du transport d’une religion d’un pays à un autre.


IL suit de-là, qu’il y a très-souvent beaucoup d’inconvéniens à transporter une religion d’un pays dans un autre[3].

"Le cochon, dit M. de. Boulainvilliers[4], doit être très-rare en Arabie, où il n’y a presque point de bois, & presque rien de propre à la nourriture de ces animaux ; d’ailleurs, la salure des eaux & des alimens rend le peuple très-susceptible des maladies de la peau." La


  1. Voyage de Bernier, tome II, page 137.
  2. Euripide, dans Athénée, liv. II, pag. 40.
  3. On ne parle point ici de la religion chrétienne ; parce que, comme on a dit au liv. XXIV, chap. I, à la fin, la religion chrétienne est le premier bien.
  4. Vie de Mahomet.