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CHAPITRE VI.

Du commerce des anciens.


LES trésors immenses de[1] Sémiramis, qui ne pouvoient avoir été acquis en un jour, nous font penser que les Assyriens avoient eux-mêmes pillé d’autres nations riches, comme les autres nations les pillerent après.

L’effet du commerce sont les richesses ; la fuite des richesses, le luxe ; celle du luxe, la perfection des arts. Les arts portés au point où on les trouve du temps de Sémiramis[2], nous marquent un grand commerce déja établi.

Il y avoit un grand commerce de luxe dans les empires d’Asie. Ce seroit une belle partie de l’histoire du commerce que l’histoire du luxe ; le luxe des Perses étoit celui des Medes, comme celui des Medes étoit celui des Assyriens.

Il est arrivé de grands changemens en Asie. La partie de la Perse qui est au nord-est, l’Hyrcanie, la Margiane, la Bactriane, &c. étoient autrefois pleines de villes florissantes[3] qui ne sont plus ; & le nord[4] de cet empire, c’est-à-dire, l’isthme qui sépare la mer Caspienne du Pont-Euxin, étoit couvert de villes & de nations, qui ne sont plus encore.

Eratosthene[5] & Aristobule tenoient de Patrocle[6], que les marchandises des Indes passoient par l’Oxus dans la mer du Pont. Marc Varron[7] nous dit que l’on


  1. Diodore, liv. II.
  2. Ibid.
  3. Voyez Pline, liv. VI, chap. XVI ; & Strabon, liv. XI.
  4. Ibid.
  5. Ibid.
  6. L’autorité de Patrocle est considérable, comme il paroît par un récit de Strabon, livre II.
  7. Dans Pline, liv. VI, chap. XVII. Voyez aussi Strabon, liv. XI, sur le trajet des marchandises du Phase au Cyrus.