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nomie. On leur a défendu d’apporter d’autres marchandises que celles du crû de leur pays : on ne leur a permis de venir trafiquer qu’avec des navires de la fabrique du pays où ils viennent.

Il faut que l’état qui impose ces loix puisse aisément faire lui-même le commerce : sans cela, il se fera, pour le moins, un tort égal. Il vaut mieux avoir affaire à une nation qui exige peu, & que les besoins du commerce rendent en quelque façon dépendante ; à une nation qui, par l’étendue de ses vues ou de ses affaires, sçait où placer toutes les marchandises superflues ; qui est riche, & peut se charger de beaucoup de denrées ; qui les paiera promptement ; qui a, pour ainsi dire, des nécessités d’être fidelle ; qui est pacifique par principe ; qui cherche à gagner, & non pas à conquérir. Il vaut mieux, dis-je, avoir affaire à cette nation, qu’à d’autres toujours rivales, & qui ne donneroient pas tous ces avantages


CHAPITRE IX.

De l’exclusion en fait de commerce.


LA vraie maxime est de n’exclure aucune nation de son commerce, sans de grandes raisons. Les Japonois ne commercent qu’avec deux nations, la Chinoise & la Hollandoise. Les Chinois[1] gagnent mille pour cent sur le sucre, & quelquefois autant sur les retours. Les Hollandois font des profits à peu près pareils. Toute nation qui se conduira sur les maximes Japonoises sera nécessairement trompée. C’est la concurrence qui met un prix juste aux marchandises, & qui établit les vrais rapports entre elles.

Encore moins un état doit-il s’assujettir à ne vendre


  1. Le pere du Halde, tome II, page 170.