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J’ajoute que, plus on met le peuple en occasion de frauder le traitant, plus on enrichit celui-ci, & on appauvrit celui-là. Pour arrêter la fraude, il faut donner au traitant des moyens de vexations extraordinaires, & tout est perdu.


CHAPITRE IX.

D’une mauvaise sorte d’impôt.


NOUS parlerons, en passant, d’un impôt établi, dans quelques états, sur les diverses clauses des contrats civils. Il faut, pour le défendre du traitant, de grandes connoissances, ces choses étant sujettes à des discussions subtiles. Pour lors, le traitant, interprête des, réglemens du prince, exerce un pouvoir arbitraire sur les fortunes. L’expérience a fait voir qu’un impôt sur le papier sur lequel le contrat doit s’écrire, vaudroit beaucoup mieux.


CHAPITRE X.

Que la grandeur des tributs dépend de la nature du gouvernement.


LES tributs doivent être très-légers dans le gouvernement despotique. Sans cela, qui est-ce qui voudroit prendre la peine d’y cultiver les terres ? & de plus, comment payer de gros tributs, dans un gouvernement qui ne supplée par rien à ce que le sujet a donné ?

Dans le pouvoir étonnant du prince, & l’étrange foiblesse du peuple, il faut qu’il ne puisse y avoir d’équivoques sur rien. Les tributs doivent être si faciles à percevoir, & si clairement établis, qu’ils ne puissent être augmentés ni diminués par ceux qui les levent. Une