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CHAPITRE IX.

Continuation du même sujet.


PAULIN ayant mandé à l’empereur Alexandre "qu’il se préparoit à poursuivre comme criminel de lese-majesté un juge qui avoit prononcé contre ses ordonnances ; l’empereur lui répondit que, dans un siecle comme le sien, les crimes de lese-majesté indirects n’avoient point de lieu[1]."

Faustinien ayant écrit au même empereur qu’ayant juré, par la vie du prince, qu’il ne pardonneroit jamais à son esclave, il se voyoit obligé de perpétuer sa colere, pour ne pas se rendre coupable du crime de lese-majesté : "Vous avez pris de vaines terreurs[2], lui repondit l’empereur ; & vous ne connoissez pas mes maximes."

Un sénatus-consulte[3] ordonna que celui qui avoit fondu des statues de l’empereur, qui auroient été réprouvées, ne seroit point coupable de lese-majesté. Les empereurs Sévere & Antonin ecrivirent à Pontius[4] que celui qui vendroit des statues de l’empereur non consacrées ne tomberoit point dans le crime de lese-majesté. Les mêmes empereurs écrivirent à Julius Cassianus que celui qui jetteroit, par hasard, une pierre contre une statue de l’empereur, ne devoit point être poursuivi comme criminel de lese-majesté[5]. La loi de Julie demandoit ces sortes de modifications : car elle avoit rendu coupable de lese-majesté, non-seulement ceux qui fondoient les statues des empereurs, mais ceux qui commettoient quelque action semblable[6] ; ce qui ren-


  1. Etiàm ex aliis caussis majestatis crimina cessant meo sæculo. Leg. 1, cod. ad leg. Jul. maj.
  2. Alienam sectæ meæ solicitudinem concepisti. Leg. 2, cod. ad leg. Jul. maj.
  3. Voyez la loi 4, §. 1, ff. ad leg. Jul. maj.
  4. Ibid. loi 5, §. 2.
  5. Ibid. §. 1.
  6. Aliudve quid simile admiserint. Leg. 6. ff. ad leg Jul. maj.