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Rapprochons, de ce passage, celui où il exprime ses véritables sentimens sur le gouvernement Anglois. « Ce n’est point à moi, dit-il, à examiner si les Anglois jouissent actuellement de cette liberté, ou non. Il me suffit de dire qu’elle est établie par leurs loix, & je n’en cherche pas davantage. Je ne prétends point par-là ravaler les autres gouvernemens, ni dire que cette liberté politique extrême doive mortifier ceux qui n’en ont qu’une modérée. Comment dirois-je cela, moi qui crois que l’excès même de la raison n’est pas toujours desirable, & que les hommes s’accommodent toujours mieux des milieux, que des extrémités ? »

Ces deux passages ainsi placés dans le point de comparaison font disparoître l’accusation dont M. Crévier a voulu noircir M. de Montesquieu, & ne laissent que l’étonnement sur l’atrocité de la calomnie.

Mais il ne faut pas encore se lasser de la surprise : l’auteur du libelle a porté l’attentat jusqu’au comble. Si on l’en croit, M. de Montesquieu est ennemi de la religion ; mais il n’est pas de ces ennemis ordinaires qui, contens de s’affranchir eux-mêmes de son joug, s’inquietent peu des sentimens que les autres ont pour elle. Il veut la détruire ; &, pour mieux réussir, il l’attaque par la ruse : mais écoutons M. Crévier. « Cet ouvrage, dit-il, dans son avant-propos, prive la vertu