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Dans les villes Grecques, où l’on ne vivoit pas sous cette religion qui établit que, chez les hommes mêmes, la pureté des mœurs est une partie de la vertu dans les villes Grecques, où un vice aveugle regnoit d’une maniere effrénée ; où l’amour n’avoit qu’une forme que l’on n’ose dire ; tandis que la seule amitié s’étoit retirée dans les mariages[1] ; la vertu, la simplicité, la chasteté des femmes y étoient telles, qu’on n’a gueres jamais vu de peuple qui ait eu, à cet égard, une meilleure police[2].


CHAPITRE X.

Du tribunal domestique, chez les Romains.


LES Romains n’avoient pas, comme les Grecs, des magistrats particuliers qui eussent inspection sur la conduite des femmes. Les censeurs n’avoient l’œil sur elles que comme sur le reste de la république. L’institution du tribunal domestique[3] suppléa à la magistrature établie chez les Grecs[4].

Le mari assembloit les parens de la femme, & la ju-

geoit
  1. Quand au vrai amour, dit Plutarque, les femmes n’y ont aucune part. Œuvres morales, traité de l’amour, p. 600. Il parloit comme son siecle. Voyez Xénophon, au dialogue intitulé, Hieron.
  2. A Athenes, il y avoit un magistrat particulier, qui veilloit sur la conduite des femmes.
  3. Romulus institua ce tribunal, comme il paroît par Denys d’Halicarnasse, livre II, pag. 96.
  4. Voyez, dans Tïte Live, liv. XXXIX, l’usage que l’on fit de ce tribunal, lors de la conjuration des bacchanales : on appella conjuration contre la république, des assemblées où l’on corrompoit les mœurs des femmes & des jeunes gens.