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CHAPITRE XX.

De la punition des peres pour leurs enfans.


ON punit à la Chine les peres pour les fautes de leurs enfans. C’étoit l’usage du Pérou[1]. Ceci est encore tiré des idées despotiques.

On a beau dire qu’on punit à la Chine les peres, pour n’avoir pas fait usage de ce pouvoir paternel que la nature a établi, & que les loix mêmes y ont augmenté ; cela suppose toujours qu’il n’y a point d’honneur chez les Chinois. Parmi nous, les peres dont les enfans sont condamnés au supplice, & les enfans[2] dont les peres ont subi le même sort, sont aussi punis par la honte, qu’ils le seroient à la Chine par la perte de la vie.


CHAPITRE XXI.

De la clémence du prince.


LA clémence est la qualité distinctive des monarques. Dans la république, où l’on a pour principe la vertu, elle est moins nécessaire. Dans l’état despotique, où regne la crainte, elle est moins en usage ; parce qu’il faut contenir les grands de l’état par des exemples de sévériré. Dans les monarchies, où l’on est gouverné par l’honneur, qui souvent exige ce que la loi défend, elle est plus nécessaire. La disgrace y est un équivalent à

  1. Voyez Garcilasso, histoire des guerres civiles des Espagnols.
  2. Au lieu de les punir, disoit Platon, il faut les louer de ne pas ressembler à leur pere. Liv. IX. des loix.