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LIVRE VI.

Conséquences des principes des divers gouvernemens, par rapport à la simplicité des loix civiles & criminelles, la forme des jugemens, & l’établissement des peines.


CHAPITRE PREMIER.

De la simplicité des loix civiles, dans les divers gouvernemens.


LE gouvernement monarchique ne comporte pas des loix aussi simples que le despotique. Il y faut des tribunaux. Ces tribunaux donnent des décisions. Elles doivent être conservées ; elles doivent être apprises, pour que l’on y juge aujourd’hui comme l’on y jugea hier, & que la propriété & la vie des citoyens y soient assurées & fixes comme la constitution même de l’état.

Dans une monarchie, l’administration d’une justice qui ne décide pas seulement de la vie & des biens, mais aussi de l’honneur, demande des recherches scrupuleuses. La délicatesse du juge augmente, à mesure qu’il a un plus grand dépôt, & qu’il prononce sur de plus grands intérêts.

Il ne faut donc pas être étonné de trouver, dans les loix de ces états, tant de regles, de restrictions, d’extensions, qui multiplient les cas particuliers, & semblent faire un art de la raison même.

La différence de rang, d’origine, de condition, qui est établie dans le gouvernement monarchique, entraîne souvent des distinctions dans la nature des biens ; & des loix relatives à la constitution de cet état, peu-