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DE L’ESPRIT DES LOIS.

Les lois de Charlemagne sur l’établissement des dîmes étoient l’ouvrage de la nécessité ; la religion seule y eut part, et la superstition n’en eut aucune.

La fameuse division [1] qu’il fit des dîmes en quatre parties, pour la fabrique des églises, pour les pauvres, pour l’évêque, pour les clercs, prouve bien qu’il vouloit donner à l’Église cet état fixe et permanent qu’elle avoit perdu.

Son testament [2] fait voir qu’il voulut achever de réparer les maux que Charles Martel, son aïeul, avoit faits. Il fit trois parties égales de ses biens mobiliers : il voulut que deux de ces parties fussent divisées en vingt-une, pour les vingt-une métropoles de son empire ; chaque partie devoit être subdivisée entre la métropole et les évêchés qui en dépendoient. Il partagea le tiers qui restoit en quatre parties ; il en donna une à ses enfants et ses petits-enfants, une autre fut ajoutée aux deux tiers déjà donnés, les deux autres furent employées en œuvres pies. Il sembloit qu’il regardât le don immense qu’il venoit de faire aux églises, moins comme une action religieuse, que comme une dispensation politique.

  1. Loi des Lombards, liv. III, tit. III, § 4. (M.)
  2. C’est une espèce de codicille rapporté par Éginhart, et qui est différent du testament même qu’on trouve dans Goldast et Baluze. (M.)
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