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SUITE DE LA DÉFENSE


Non une simple tolérance,
Mais une froide indifférence :
Tout lui paroît fruit du terroir.


Chacun a ses yeux : pour moi je n’ai point vu cette froide indifférence dont on accuse notre politique ; mais j’y ai vu, en gros caractères, l’amour de l’ordre et la haine du vice : un philosophe qui, laissant indécises les questions douteuses, et ne prenant aucun parti quand il est dangereux ou inutile d’en prendre un, vise toujours au bonheur de ses semblables, et déteste constamment la tyrannie, qui est un obstacle à ce bonheur.

Je n’ai point vu que tout lui parut fruit du terroir ; mais j’ai vu un système touchant l’influence du climat sur les lois, que peu de personnes peuvent goûter, parce que peu de personnes peuvent en suivre la chaîne : un système, trop nouveau pour ne pas exciter les clameurs des dévots : un système trop fécond en conséquences pour ne pas prévoir qu’on ne manqueroit pas d’en tirer de mauvaises.

Je n’ai point vu qu’il fasse de l’homme un être machinal, un automate, un individu esclave des lois du monde matériel, comme quelques-uns le lui ont attribué ; mais j’ai vu qu’il avoit en main la clef de mille paradoxes politiques.

Le sol est la cause première
De nos vices, de nos vertus.

M.de M... n’a point avancé cette erreur ; seulement il dit, d’après l’expérience, que le physique du climat influe sur les mœurs : de là on peut inférer que le sol est une des causes de nos qualités bonnes et mauvaises, mais non de nos vices et de nos vertus : choses différentes qu’il ne