ne sont pas volontaires : elles cessent d’être criminelles dès qu’elles cessent d’être libres ; l’homme n’est plus coupable dès qu’il n’est plus agent.
Cette proposition me fait donc de la peine, en ce qu’en dérobant le suicide à la vengeance divine, elle semble l’autoriser. Peut-être faut-il l’expliquer plus favorablement, peut-être faut-il adoucir ces mots : « indépendante de toute autre cause » par ceux-ci : « tient à l’état physique de la machine ». Cette expression « tient » étoit si réservée, qu’elle n’annonçoit pas une entière indépendance.
Une preuve bien claire de l'impiété [1] de l’auteur de l'Esprit des Lois, c’est la qualité de grand homme qu’il a donnée à Bayle flétrissant la religion. « Dire de Bayle : C’est un abominable : ce n’est pas une injure, c’est une vérité. »
Fût-ce une vérité, ce ne seroit pas moins une injure. Qu’on traite d’abominables des critiques, qui, déterminés par la passion seule, ressemblent à ces animaux toujours avides de sang ; le public dira : C'est une vérité ; les critiques ne seront pas moins en droit de dire : C'est une injure. Je choisis cet exemple, parce qu’il s’agit de rendre d’une manière sensible ma pensée à des gens qui ne sentent point.
Quant au philosophe de Rotterdam, les insultes des jansénistes de Paris ne diminueront point sa gloire. C’étoit un terrible homme que ce Bayle ! On ne doit l’attaquer qu’avec respect, le combattre qu’avec crainte, le condamner qu’après l’avoir admiré : on ne foule aux pieds qu’en tremblant un lion qui vient d’expirer.
- ↑ Nouvelles du 28 octobre 1749. Je cite mon garant, parc que le fait est si peu vraisemblable qu’on ne le croirait pas sur ma parole. (La B. (Sup. p. 130.)