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SUITE DE LA DÉFENSE


pour les choses de l’autre vie, mais avec très-peu de connoissance des affaires de celle-ci. »

J’ai deux remarques à faire sur ce passage.

La première est contre les critiques. Je ne conçois pas qu’on puisse s’aveugler au point de prétendre que les Pères de l’Église n’ont pas montré leur ignorance dans les affaires de ce monde en déclamant contre le mariage, qui en est le perpétuel réparateur. Est-ce entendre les intérêts de la société civile, que de saper les fondements de la société ? Eh, Messieurs, dites, si vous voulez, que les Pères étoient de fort bons chrétiens ; on vous l’accordera peut-être ; mais ne dites pas que ces bons chrétiens étoient de bons politiques ; leurs écrits vous donneraient un démenti formel.

Ma seconde remarque est contre l’auteur. Je ne conçois pas qu’un jurisconsulte philosophe ait pu se résoudre à faire l’éloge de principes défectueux. Un zèle qui anéantit l’espèce humaine seroit un zèle louable ? On pourroit être tout à la fois coupable de la destruction de ce monde, et louable de ce pieux dessein ? On seroit récompensé dans l’autre vie pour avoir troublé les affaires de celle-ci ? ce seroit être véritablement zélé pour les choses du ciel, que d’être fanatique sur celles de la terre ?

Non : la raison proscrit ces bizarres idées, et la religion les désavoue. L’une et l’autre vivent dans une parfaite intelligence : les séparer, c’est les méconnoître ou les trahir : unies par le nœud le plus étroit, elles se prêtent un secours mutuel. Ce sont deux flambeaux, dont l’un ne sauroit briller quand l’autre est éteint. Ce sont deux époux, dont l’un ne sauroit survivre à la mort de l’autre.

Un zèle dont les principes produisent de pernicieux