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L’ESPRIT DES LOIS EN VERS [1].


Vous avez lu l'Esprit des Lois :
Que pensez-vous de cet ouvrage ?
Ce n’est qu’un pénible assemblage
De république et de rois.
On y voit des mœurs de tout âge,
Et des peuples de tous les lieux :
Le civilisé, le sauvage,
Leurs législateurs et leurs dieux.
Sur tous ces objets d’importance,
L’auteur nous laisse apercevoir,
Non une simple tolérance,
Mais une froide indifférence ;
Tout lui parait fruit du terroir.
Le sol est la cause première
De nos vices, de nos vertus ;
Néron dans un autre hémisphère
Aurait peut-être été Titus.
L’esprit n’est que second mobile,
Et notre raison versatile
Est dépendante des climats ;
Féroce au pays des frimats,
Voluptueuse dans l’Asie,
Le même ressort ici-bas
Détermine sa fantaisie.
Ainsi, sans un grand appareil,
On peut, dans le siècle où nous sommes,
Par les seuls degrés du soleil
Calculer la valeur des hommes.

  1. Par Bonneval. Cette petite pièce, qui a beaucoup circulé lors de l’apparition de l'Esprit des Lois, a été souvent altérée par les copistes. Nous donnons le texte qui nous semble le plus pur. Il est tiré de la Correspondance de Grimm et Diderot. Édit. Tourneux, in-8, Garnier 1877, Ier vol., page 203.