Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/252

Cette page n’a pas encore été corrigée
236
RÉPONSE A LA DÉFENSE


vaut bien Saumaise. Mais, encore une fois, c’est le bon sens qui doit juger entre Scaliger et Saumaise, entre nous et l’auteur. En entendant l’usure oncière de douze pour cent par an , tout s’explique de soi-même. Cette usure surchargeant le peuple, quelquefois on fut obligé de la réduire à six pour cent, qui étoit la demi-oncière ; d’autres fois à quatre pour cent qui étoit le tiers de l’usure oncière. Si l'on s’étonne que les lois des Douze Tables aient permis l’usure à douze pour cent, Saumaise répond que les Romains, qui ont emprunté des Grecs leurs lois, firent de l’usure la plus légère des Grecs, l’usure la plus forte qu’il fût permis d’exiger dans Rome. Il n’est pas douteux que le droit romain, qui étoit en vigueur avant Justinien, n’ait autorisé l’usure à douze pour cent par an ; tous les mois on payoit un pour cent. C’est ce qu’on appeloit la Centésime : on le voit en particulier dans saint Ambroise, qui dit que le capital de la somme prêtée par un usurier enfante tous les mois la centésime. Veniunt kalendœ : parit sors centesimam ; veniunt menses singuli, generantur usurœ (lib. de Tobia, cap. XII). En voilà assez pour un sujet si mince. Nous ne nous y sommes arrêtés que parce que l’auteur en fait presque le capital de sa Défense.

Nous laissons sans réponse une troisième partie où cet auteur établit de grandes maximes, comme pour nous servir de leçons. C’est le Joueur de la comédie qui, après avoir perdu son argent, se fait lire Sénèque.

En répondant comme nous venons de le faire à l’auteur de l’Esprit des Lois, nous n’avons rien extrait des Lettres persanes, que le public lui attribue. Il est bon néanmoins que l'on sache que l’auteur de ces lettres fait le monde éternel (lettre CXIII), et qu’il nie la prescience