Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/202

Cette page n’a pas encore été corrigée
186
DÉFENSE


rence est que les autres choses peuvent ou se louer ou s’acheter, au lieu que l’argent, qui est le prix des choses, se loue et ne s’achète pas.

« C’est bien une action très-bonne de prêter à un autre son argent sans intérêt ; niais on sent que ce ne peut être qu’un conseil de religion, et non une loi civile.

« Pour que le commerce puisse se bien faire, il faut que l’argent ait un prix, mais que ce prix soit peu considérable. S’il est trop haut, le négociant qui voit qu’il lui en coûteroit plus en intérêts qu’il ne pourroit gagner dans son commerce, n’entreprend rien. Si l’argent n’a point de prix, personne n’en prête, et le négociant n’entreprend rien non plus.

« Je me trompe quand je dis que personne n’en prête : il faut toujours que les affaires de la société aillent ; l’usure s’établit, mais avec les désordres que l’on a éprouvés dans tous les temps.

« La loi de Mahomet confond l’usure avec le prêt à intérêt : l’usure augmente dans les pays mahométans à proportion de la sévérité de la défense ; le prêteur s’indemnise du péril de la contravention.

« Dans ces pays d’Orient, la plupart des hommes n’ont rien d’assuré ; il n’y a presque point de rapport entre la possession actuelle d’une somme et l’espérance de la ravoir après l’avoir prêtée. L’usure y augmente donc à proportion du péril de l’insolvabilité ».

Ensuite viennent le chapitre Des usures maritimes, que j’ai rapporté ci-dessus ; et le chapitre XXI qui traite Du prêt par contrat, et de l'usure chez les Romains, que voici :

« Outre le prêt fait pour le commerce, il y a encore une espèce de prêt, fait par un contrat civil, d’où résulte un intérêt ou usure.