Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/199

Cette page n’a pas encore été corrigée
183
DE L’ESPRIT DES LOIS.


une fécondité constante ; mais, dans l’espèce humaine, la manière de penser, le caractère, les passions, les fantaisies, les caprices, l’idée de conserver sa beauté, l’embarras de la grossesse, celui d’une famille trop nombreuse, troublent la propagation de mille manières. » Et, dans l’autre, il a dit : « L’obligation naturelle qu’a le père de nourrir ses enfants, a fait établir le mariage, qui déclare celui qui doit remplir cette obligation. »

On dit là-dessus : « Un chrétien rapporterait l’institution du mariage à Dieu même, qui donna une compagne à Adam, qui unit le premier homme à la première femme par un lien indissoluble, avant qu’ils eussent des enfants à nourrir ; mais l’auteur évite tout ce qui a trait à la révélation. » Il répondra qu’il est chrétien, mais qu’il n’est point imbécile ; qu’il adore ces vérités, mais qu’il ne veut point mettre à tort et à travers toutes les vérités qu’il croit. L’empereur Justinien étoit chrétien, et son compilateur [1] l’étoit aussi. Eh bien ! dans leurs livres de droit, que l’on enseigne aux jeunes gens dans les écoles, ils définissent le mariage : l’union de l’homme et delà femme qui forme une société de vie individuelle [2]. Il n’est jamais venu dans la tête de personne de leur reprocher de n’avoir pas parlé de la révélation.


USURE.


Nous voici à l’affaire de l’usure. J’ai peur que le lecteur ne soit fatigué de m’entendre dire que le critique

  1. Tribonien.
  2. Maris et feminœ conjunctio, individuam vitœ societatem continens.