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DE L’ESPRIT DES LOIS.


de ce qu’il désapprouvent qu’une infinité de gens riches et voluptueux se portassent à fuir le joug du mariage, pour la commodité de leurs dérèglements ; qu’ils prissent pour eux les délices et la volupté, et laissassent les peines aux misérables : on ne pouvoit, dis-je, s’en plaindre. Mais le critique, après avoir cité ce que l’auteur a dit, prononce ces paroles : « On aperçoit ici toute la malignité de l’auteur qui veut jeter sur la religion chrétienne des désordres qu’elle déteste. » Il n’y a pas d’apparence d’accuser le critique de n’avoir pas voulu entendre l’auteur : je dirai seulement qu’il ne l’a point entendu, et qu’il lui fait dire contre la religion ce qu’il a dit contre le libertinage. Il doit en être bien fâché.


ERREUR PARTICULIÈRE

DU CRITIQUE.


On croiroit que le critique a juré de n’être jamais au fait de l’état de la question, et de n’entendre pas un seul des passages qu’il attaque. Tout le second chapitre du livre XXV roule sur les motifs plus ou moins puissants qui attachent les hommes à la conservation de leur religion : le critique trouve dans son imagination un autre chapitre qui auroit pour sujet des motifs qui obligent les hommes à passer d’une religion dans une autre. Le premier sujet emporte un état passif ; le second un état d’action ; et, appliquant sur un sujet ce que l’auteur a dit sur un autre, il déraisonne tout à son aise.

L’auteur a dit au second article du chapitre II du