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DÉFENSE


tions. Il ne s’agit pas moins que de savoir s’il est spinosiste et déiste ; et, quoique ces deux accusations soient par elles-mêmes contradictoires, on le mène sans cesse de l'une à l’autre. Toutes les deux étant incompatibles ne peuvent pas le rendre plus coupable qu’une seule ; mais toutes les deux peuvent le rendre plus odieux.

Il est donc spinosiste, lui qui, dès le premier article de son livre, a distingué le monde matériel d’avec les intelligences spirituelles.

Il est donc spinosiste, lui qui, dans le second article, a attaqué l’athéisme : « Ceux qui ont dit qu’une fatalité aveugle a produit tous les effets que nous voyons dans le monde, ont dit une grande absurdité : car, quelle plus grande absurdité qu’une fatalité aveugle, qui a produit des êtres intelligents ? »

Il est donc spinosiste, lui qui a continué par ces paroles : « Dieu a du rapport a l’univers comme créateur et comme conservateur [1] ; les lois selon lesquelles il a créé, sont celles selon lesquelles il conserve ; il agit selon ces règles, parce qu’il les connoît ; il les connoît, parce qu’il les a faites ; il les a faites, parce qu’elles ont du rapport avec sa sagesse et sa puissance. »

Il est donc spinosiste, lui qui a ajouté : « Commenous voyons que le monde formé par le mouvement de la matière et privé d’intelligence subsiste toujours, etc. »

Il est donc spinosiste, lui quia démontré contre Hobbes et Spinosa, « que les rapports de justice et d’équité étoient antérieurs à toutes les lois positives [2] ».

Il est donc spinosiste, lui qui a dit au commencement

  1. Liv. I, ch. I.
  2. Liv. I, ch. I.